Il y a quelques années, je me battais encore pour l’indépendance du Québec car j’y croyais… Je croyais et crois toujours que le Québec est une nation distincte et qu’elle mérite d’avoir son propre pays… Mais aujourd’hui je me pose de sérieuses questions sur la nature même d’un tel État québécois lorsqu’il s’agit de mettre de l’avant sa politique étrangère, et pour cause !
Pour qu’un « néo-Québécois » comme moi puisse admettre de se rendre à l’urne et déposer son bulletin de vote donnant accès à l’indépendance du Québec, il lui faudra plus qu’une promesse politique ou simplement des discours d’une « politique-politicienne ». Il lui faut sa place à part entière dans la société québécoise… Or, il se trouve que le Québec vit un grave problème d’identité, du moins dans la recherche des valeurs qui définissent sa société. Comment être Québécois et en même temps être fermé quant à l’acceptation de l’autre dans sa différence? Comment accepter l’autre lorsque l’on méconnaît son histoire, ses traditions et par-dessus tout la politique du pays duquel l’autre est originaire?
Nul ne conteste la difficulté de cette tâche surtout après le triste souvenir de la tragédie des attentats terroristes du 11 septembre 2001. Mais le problème réside plus dans la manière dont les politiciens québécois ou dois-je dire leurs assistants leur rapportent la réalité revue et corrigée selon les angles qui leur convient… Ce ne sont pas les exemples qui manquent, mais avant de traiter de cette question, je me permets de mettre à l’examen certains constats dont j’espère que cette tribune permettra d’y apporter un début de réponse si ce n’est un débat constructif pour le bien de la société québécoise d’aujourd’hui dans toutes ses composantes.
Avoir une réelle politique étrangére
Tout d’abord, assumer une politique étrangère indépendante du Canada est un devoir sacré, mais à la seule condition que ladite politique étrangère du Québec soit basée sur une approche logique et surtout justifiée tant au niveau humanitaire (thème favori des Québécois) qu’économique (cher au milieu financier). Ensuite, il faudra que l’implication du Québec au niveau international—du moins au niveau de la compréhension des enjeux actuels qui secouent la planète—soit plus solide. Certes les limitations constitutionnelles actuelles et le déficit du Québec ne permettent peut-être pas pour l’instant d’avoir des services gouvernementaux plus fonctionnels, capables d’analyser la réalité qui prévaut dans certains pays.
Or, il se trouve que le Québec ou dois-je dire les gouvernements successifs oublient souvent que ces services peuvent être détournés s’ils prenaient en considération le rôle que les communautés culturelles peuvent jouer dans ce contexte précisément. En effet, ces dernières peuvent largement contribuer à la formulation d’une politique étrangère plus équilibrée et basée sur la compréhension objective des causes et effets des crises internationales, de par le fait qu’elles comprennent les enjeux qui secouent leurs pays d’origine.
Malheureusement, cette vérité est propre à tous les partis politiques du Québec. Combien de fois avez-vous vu une approche gouvernement-communautés culturelles basée sur un échange réel avec les différentes facettes de ces communautés sans que ce soit une période d’élections?
Mieux connaître ses concitoyens
Avoir une politique étrangère, commence avant tout chez soi en acceptant l’autre dans sa différence mais surtout par le comprendre, apprendre son histoire, ses traditions, noter ses besoins et essayer par-dessus tout de lui tendre la main pour qu’il puisse s’intégrer dans notre société québécoise au visage changeant.
La politique étrangère, elle, doit refléter cette approche et cette compréhension de l’autre. Ce faisant, l’établissement d’un contact avec le pays d’origine est alors facilité plus par cet échange qui commence chez soi. Combien de régimes oppriment leurs citoyens qui se retrouvent réfugiés au Québec qu’ils adoptent comme leur nouvelle patrie? Quelle est—et sera—la « politique » du Québec vis-à-vis de ces pays? Et si demain il y avait une guerre qui opposait un Québec indépendant à ces régimes? Comment sécuriser l’allégeance des natifs de ces pays?
Or, à voir de plus près les « politiques » du gouvernements québécois vis-à-vis de certains de ces régimes, l’on se demande alors si le Québec est assez « mature » pour assumer une lourde tâche, celle de mener seul sa politique étrangère ou tout simplement, devenir indépendant.
Considérons à titre d’exemple, la Francophonie. C’est l’une des voies des plus bénéfiques de consolider ses assises sur la scène mondiale. Et voilà qu’au lieu que Québec ne mette les bouchées doubles pour établir des antennes plus permanentes et plus solides et investir plus dans ses relations avec ces pays, il se limite en choisissant quelques pays ici et là ou d’envoyer des « Délégués itinérants » au lieu de mettre en place des délégations culturelles pour commencer… puis commerciales par la suite. Combien de marchés francophones ne sont pas couverts par le Québec alors que d’autres pays francophones et non des moindres y sont présents?
Une « politique » internationale appropriée
Quant à la « politique-politicienne » en relations internationales, n’est-il pas préférable d’en avoir une qui soit en complète harmonie avec les valeurs du Québec, si l’on prend en considération que c’est l’humain qui l’emporte ? Dans ce cas, comment expliquer que Québec n’ait pas encore pleinement établi une Délégation à part entière dans le seul pays, pilier de la Francophonie au Proche et Moyen-Orient : Le Liban? Pourquoi l’agent responsable de l’immigration ou la sélection des immigrants se trouve à Damas, capitale actuelle du terrorisme mondial? Pourquoi ne pas transférer ses services à Beyrouth, capitale francophone du Levant? N’est-il pas un geste de « reconnaissance officielle » de la souveraineté libanaise par le Québec? Même si c’est au fédéral qu’incombe la tâche de la représentation politique étrangère, il appartient au Québec aujourd’hui de faire la preuve de maturité en matière de jugement de situation et de re-localiser ses services d’immigrations ou de sélection des immigrants à Beyrouth même, du moins pour les services destinés au Libanais. Pour cela, il n’a pas à avoir la « bénédiction » du fédéral ! Qu’attend-t-il alors ?
Par ailleurs, lorsque l’on parle des problèmes du Proche et Moyen-Orient, l’on trouve toujours le Québec du côté « de l’opprimé ». Ce qui est excellent… mais à la condition que l’on puisse réellement identifier qui est l’opprimé ou la victime dans certains cas. Certes, le Proche et Moyen-Orient ne sont pas aussi faciles à comprendre, mais lorsqu’une Nation se veut indépendante, il lui appartient de regarder les deux côtés de la médaille tout en se dissociant de la problématique étrangère… Ce faisant, elle pourra alors avoir un regard plus équilibré et moins biaisé, basé sur une analyse concrète et objective. Ce qui ne semble pas le cas actuellement…!
Bref, lorsque l’on décide de fonder un pays, l’on est dans l’obligation de définir sa position sur la scène internationale, non seulement en matière d’environnement qui est, certes, une cause sacrée. Il s’agit avant tout de faire la preuve d’une compréhension tous azimuts de l’autre aussi bien à l’intérieur des frontières du Québec qu’à l’extérieur. Ce n’est qu’en comprenant les réalités qui secouent le monde actuel et en ayant le budget nécessaire pour former la machine gouvernementale à ces problématiques pour donner l’heure juste et objective, que le Québec pourra espérer être prêt pour franchir le pas vers une indépendance totale !