C’était un soir d’automne, un jeudi soir qui aurait pu être banal. Je marchais en direction du théâtre St-Denis. J’étais en avance au rendez-vous, un concert-bénéfice de la Fondation Garceau fondée par Brigitte Garceau et l’Institut des affaires publiques de Beryl Wajsman, venant en aide aux démunis, notamment des enfants. Je décidai d’entrer dans un café, et là, près de la fenêtre, je bus un allongé, en regardant la rue et les gens. La misère est palpable, parfois criante, parfois discrète. Il y avait une bande de jeunes assis par terre, des marginaux, diraient certains. Il y avait des vagabonds, des itinérants. Il y avait aussi des regards vides, des visages hébétés, comme ceux de l’immigrant, du divorcé, de la femme battue. Est-ce parce que je me rendais au concert « Les lilas de Cassandra », que je remarquai avec plus d’acuité cette détresse urbaine ? Quoi qu’il en soit, je fus frappée de plein fouet par la misère de la rue, ce soir-là.
Ayant passé jusqu’à présent l’essentiel de sa vie à aider les autres, que ce soit au travers de son travail d’avocate, et aussi par ses multiples activités et implications communautaires, Brigitte Garceau, par sa fondation, œuvre à venir en aide aux démunis, notamment les enfants. L’amour, pensons-nous, sauvera le monde. Cet espoir, à lui seul, permet « d’adoucir les conditions » et de donner du courage. Justement, par le biais du spectacle « les Lilas de Cassandra », Brigitte Garceau ouvre une fenêtre sur l’espoir, pour faire en sorte que le passé horrible de certaines personnes puisse se reconstruire, fleurir et refleurir.
Cette ouverture sur le possible, sur la construction d’un monde meilleur, permet aux démunis de garder la tête haute et ouvre la question : « Qui peut dire à quoi ressemblera notre avenir ? » Ayant vu la mobilisation de toute la communauté et de tous les gens présents à ce spectacle, je suis persuadée que les choses peuvent changer. En effet, certains spectacles nous touchent plus que d’autres, justement parce qu’ils véhiculent non seulement un message universel, mais également une voix, une inspiration, s’adressant directement au cœur humain. « Les lilas de Cassandra » est un de ceux-là. « Le lilas, comme un enfant, est une belle fleur, mais fragile », expliquait Brigitte Garceau, dans son discours d’introduction. Il y a quelque chose de si vibrant et de si exaltant dans ce simple message, qu’il faut juste franchir le pas pour libérer en nous la compassion humaine nécessaire à un peu de lumière, cette parcelle de lumière apte à chasser la haine, la peur, et à adoucir les conditions des plus démunis.
De plus, « Les lilas de Cassandra » possède une signification authentique, en portant le prénom de la fille de Mme Garceau, qui s’inscrit tout naturellement dans la mémoire et porte le message en toute simplicité et en toute beauté. Sous la présidence d’honneur de la juge Andrée Ruffo, cette voix éclairante, nous sommes en phase avec ces valeurs de partage, de solidarité et d’aide aux autres, qui appellent chacun et chacune de nous à sortir de l’indifférence, face à la misère que l’on croise partout dans la rue, notamment face à la cruauté dont sont victimes de trop nombreux enfants. L’importance de reconsidérer ses propres valeurs demeure donc un déterminant important dans l’actuel combat visant à résoudre les problèmes de pauvreté. Chacun, chacune, attend de l’avenir des conditions meilleures, qui lui permettront, enfin, d’atteindre le bonheur.
Cette conviction, cette attente, ou le combat que l’être humain mène pour ce bonheur futur, nous amène à ne pas capitonner nos vies au point d’oublier la détresse concrète des autres qui, de près ou de loin, sont autour de nous. En effet, pour certaines personnes, la vie quotidienne est un défi. Face à cela, pour les gens plus privilégiés, la vie devient un devoir. Un devoir qui demande à être accompli : nous ne pouvons pas demeurer indifférents devant la multitude des problèmes sociaux et la détresse humaine.
Le concert « Les lilas de Cassandra » donne les moyens d’aller de l’avant, de convaincre les autres, et finalement d’affronter la vérité, la réalité, de ces trop nombreux démunis. Par exemple, le docteur Gilles Julien, par l’entremise d’une présentation vidéo, expliquait la nécessité de respecter la Déclaration des droits de l’enfant, telle que rédigée par l’Organisation des Nations Unies, si on veut réellement faire quelque chose pour contrer la pauvreté chez les enfants du monde. En effet, avant qu’il ne soit trop tard, c’est-à-dire avant que le mal ne soit déjà fait, il faut absolument s’activer, surtout dans certains quartiers de Montréal, pour dépister les sources potentielles de problématiques sociales susceptibles d’aggraver les conditions des plus démunis, et desquelles il devient ensuite très difficile de sortir. En somme, il faut comprendre les signes avant-coureurs, pour mieux agir et réagir face à la détresse grandissante des enfants. Parce que « dès qu’on appelle la DPJ, explique le docteur Gilles Julien, il est trop souvent trop tard, dit-il. Le dommage est fait. »
Donc, c’est ainsi, au travers d’un spectacle haut en couleur, où les tours de chant ont côtoyé la présence vidéo du docteur Julien, que nous prenons conscience qu’il est du devoir de toute la communauté de prendre la responsabilité du bien-être de tous les enfants. Cela devrait être un véritable « devoir citoyen », réellement, et ne pas relever seulement d’une prise en charge par les gouvernements. Si tout le monde, concrètement, se mobilise, nous pouvons apprendre à reconsidérer certaines valeurs, pour faire notre possible dans le but d’accorder un peu de dignité à ceux qui souffrent et sont en difficulté.
L’amour est une arme, l’amour est sans limite, d’une puissance inégalée, c’est le summum de la vie. C’est l’attribut des braves, en fait, c’est ce qui les définit tout entier. Ce sentiment n’est pas à la portée des lâches, il n’est pas dogmatique, désincarné, rigide. C’est, au contraire, une force donnant la vie à son tour : c’est l’attribut du cœur. C’est en allant au plus profond de nous-mêmes, et en acceptant de donner généreusement, que nous avons le plus de chances de rencontrer les autres et d’atteindre la victoire. Le vrai courage appartient à ceux qui aiment. Et c’est souvent au milieu de la détresse humaine que l’on trouve la confirmation d’amour dans cette vie. En effet, différents organismes font un travail remarquable, telle la « Maison du Partage d’Youville », qui œuvre depuis 25 ans en tant que cuisine communautaire. Aussi « De la rue… à la Réussite », qui aide de nombreux hommes et femmes à réintégrer la société active et à reprendre leur vie en main. Finalement, la fondation du Docteur Nicolas Steinmetz et du Docteur Gilles Julien œuvre à la promotion de la pédiatrie sociale.
En fait, tous les organismes sociaux forment une sorte de noyau, réunissant en un tout l’espoir permettant aux gens démunis de connaître une petite victoire quotidienne, pour contrer l’angoisse et le désespoir. En effet, il existe un chagrin qui dépasse l’expérience que nous en avons. Il existe un courage dont nous avons du mal à saisir tout le sens : celui des gens qui connaissent des conditions de vie extrêmes. Mais ils tiennent bon. Et ils chantent.
À nous donc de les aider, pour qu’eux et leurs enfants puissent entretenir la flamme de l’espérance.
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