Il semble que l’élément le plus important à retenir de la dernière élection fédérale soit le supposé renouveau de la gauche. En fait, cet élément est un non-événement. Il n'y a pas eu de renouveau de la gauche.
On tente ainsi de démontrer que le succès du NPD est d’abord un phénomène québécois enveloppé dans une « énigme » du Québec. On tente aussi de nous faire croire que ces élections signifient un pays divisé et désespérément polarisé entre une droite récalcitrante et une gauche autocrate. Et pourtant, les raisons sont toutes autres : la fatigue des Québécois pour la séparation et l’incapacité pour les libéraux de rallier les Canadiens à travers un message authentique.
Aujourd’hui, il est temps pour le Parti Libéral de reprendre son message premier, négligé par la timidité, durant les dernières décennies. Il est temps de le déclarer à nouveau clairement et ouvertement:
Le libéralisme est important ! Toujours et partout. Quand et où les gens aspirent à être libres,
le libéralisme est important. Dans la quête de l’épanouissement de nos possibilités individuelles,
le libéralisme est important. En regardant les zones grises des défis les plus difficiles, le libéralisme est important. Il est important parce que l'évangile libéral authentique nous offre la seule chose dont les gens ne peuvent se passer : l’espoir. Nous en avons besoin autant que de l'eau que nous buvons et de l'air que nous respirons. Avec l’espoir nous pouvons tout accomplir. Sans espoir, une nation devient le miroir de la vision d'Ézéchiel, une vallée d’ossements secs.
Ça fait trop longtemps que le Parti libéral essaie de définir le libéralisme comme un ensemble de pratiques comptables ou de positionnements politiques centristes. Le libéralisme ne peut pas réussir une fois réduit à une stratégie qui plaît à tout le monde. Il ne peut non plus réussir comme la façade du cuirassé Potemkine pour représenter « ce que la base veut. » Le libéralisme n'est pas facile, il est difficile. Il est difficile parce qu'il représente surtout l'idéal dont son nom origine : la liberté. Et c’est là qu’on retrouve l’espoir. Mais comme Bernard Shaw a écrit : « La liberté exige la responsabilité, c’est pourquoi tant de gens en ont peur ! » Le libéralisme et les libéraux réussissent quand ils sont menés par des chefs passionnés et résolus. Ils réussissent avec des chefs capables d’amener les gens à trouver le courage de surmonter leurs craintes.
Lors de cette dernière élection, les Québécois cherchaient l'espoir. Ils voulaient la liberté. Ne trouvant aucun champion vigoureux et porteur de ces désirs, ils ont tout simplement opté pour le changement. Même si cela voulait dire élire des étudiants universitaires et des « barmaids » en vacances.
L'alpha et l'oméga de cette campagne se sont produits durant la fin de semaine du congrès du PQ. Marois et Duceppe répétaient le même venin, mais cette fois avec plus de poison. Non seulement ils promettaient un autre référendum, mais Marois menaçait l'utilisation de la « clause nonobstant » contre quiconque aurait la témérité de demander la protection de la Charte des droits et libertés de notre pays. En outre, elle a déclaré que l'accès aux cégeps anglophones serait interdit aux francophones et aux allophones et qu'un gouvernement péquiste forcerait les juges à interpréter les lois par « la primauté de la protection de la langue française et des valeurs du Québec. » Les francophones en avaient assez.
Les parents francophones veulent que leurs enfants aient toutes les chances d’avoir du succès dans la vie. Ils savent qu'en Amérique du Nord, on doit être capable de fonctionner en anglais. En outre, ils sont tout à fait confiants en leur capacité à protéger leur culture. Ils étaient également fatigués de la possibilité d'un autre référendum et plusieurs ont été choqués par l’ingérence possible sur l'indépendance juridique et les restrictions des libertés que la Charte garantit.
Ne voyant aucun champion pour exprimer la protection de leurs libertés chez les conservateurs ou les libéraux, ils ont simplement voté pour le NPD en signe de changement et de protestation. Le fédéralisme doux du NPD est devenu très acceptable pour un grand nombre de nationalistes mous au Québec. Les sondages de CROP et d'EKOS, qui ont été les premiers à démontrer la montée subite du NPD au Québec, ont été réalisés dans les deux jours suivants le congrès du PQ. Au cours de cette période, plusieurs observateurs du Québec ont rondement condamné l’extrémisme du PQ.
Les médias nationaux du Canada se sont empressés de rattraper et d’essayer d'expliquer le « phénomène ». Et rarement, il y a eu un tel exemple des deux solitudes. Ainsi, obsédés qu’ils étaient par la campagne électorale, ils ont accordé très peu d’attention au congrès du PQ. La seule exception est Chantal Hébert qui a traité de l’événement. Layton a alors ressuscité comme Lazare.
Presque tous les observateurs ont attribué la montée du NPD au Québec à la performance de Layton au débat des chefs en français. Pourtant c’est faux. Il n’a pas fait mieux ou pire que les autres. Mais on se devait de fournir une explication, fut-elle incorrecte. Cet « appui » national pour Layton a légitimé le NPD à travers le pays sans qu’aucune critique ne soit dirigée vers sa plateforme irréaliste et sa position méprisable selon laquelle un Québec séparé serait le bienvenu dans une nouvelle fédération canadienne et serait toujours éligible aux avantages canadiens.
Mais les Canadiens étaient plus intelligents que les chroniqueurs. Le vote de contestation contre le Bloc au Québec a donné 58 nouveaux sièges au NPD. Mais à l'extérieur du Québec, le parti a remporté seulement 8 nouveaux sièges. Pas vraiment une approbation vigoureuse de la gauche ! Et à peine une raison indiscutable de mettre la promesse du libéralisme à la poubelle de cet anachronisme qu’est le socialisme.
Ceux qui rêvent maintenant « d’unir la gauche » manquent la cible et préparent un climat politique, heureusement passager, qui échouera aux urnes, mais qui réussira à polariser le Canada et les Canadiens pour des générations. Ces patriotes de convenance seront durement condamnés par l'Histoire.
La majorité de Harper n'a pas été gagnée en raison du succès de NPD au Québec, mais bien par l’échec libéral en Ontario. Et cet échec s'est produit parce que les libéraux ont abandonné les principes fondamentaux du libéralisme canadien.
Premièrement, la croyance dans un fédéralisme qui rejette la supériorité morale ou le statut spécial de l'une ou l'autre des deux cultures européennes qui ont fondé le Canada. Deuxièmement, la fidélité à la suprématie de la personne sur toute idéologie étatiste. Troisièmement, l'engagement à l’équité pour chaque citoyen devant nos cours avec des lois qui sont les boucliers des innocents et les bâtons des justes et non des épées à double tranchant pouvant servir à l’oppression. Quatrièmement, le rejet de la gouverne interventionniste qui menace non seulement de remettre l'état de nouveau dans les chambres à coucher mais qui lui permet de suivre le citoyen dans la rue avec des contrôles coercitifs et des interdictions sur des prérogatives privées. Cinquièmement, la foi en l'idéal de l'État-providence où la compassion permet les coups de main sans que ce soient nécessairement des largesses. Sixièmement, la compréhension d’une économie de marché équitable. Septièmement, l’équilibre entre le droit à la récompense pour des initiatives individuelles ou provenant des entreprises, mais sans les privilèges et préférences incontrôlées qui empêchent les Canadiens de tirer profit de la richesse du pays qu’ils ont forgé. Huitièmement, l’attachement à notre rêve d'une société juste ne se limite pas à nos frontières, mais nous impose aussi de nous engager à l'étranger comme nous le faisions si bien à une autre époque.
C’est seulement quand nous entendrons de nouveau des échos de ces sentiments qui font vraiment appel à nos « anges plus nobles » que les Canadiens comprendront pourquoi le libéralisme est important. Bon nombre d'entre nous sont devenus politiquement matures avec ces idéaux et ils y croient. Et cette foi - ce libéralisme - a réussi tellement souvent parce que les hommes et les femmes qui travaillent, servent et se sacrifient comprennent que – en dépit de beaucoup de doléances légitimes – cette orientation est la seule vraie sécurité contre la domination économique déchainée par les intérêts de la droite et la suffocation de même que les tendances appauvrissantes et autoritaires de la gauche. Le libéralisme est la manifestation politique de cette foi sainte qui est aussi vieille que les écrits saints et aussi vraie que le temps lui-même. Il vise à ce que la liberté de chaque citoyen sera contrainte uniquement par les demandes de liberté égale des autres.
C’est seulement cette foi qui peut allumer les milliers de centres d'énergie créative et d’audace nécessaires pour enrayer les derniers vestiges de l'injustice et de l’inégalité. Nous pourrons ainsi perfectionner l'oasis de la liberté et espérer que tous essaierons de l’atteindre. Je ne pense pas que ceux qui nous ont laissé ce legs - de Spinoza à Descartes, de Locke à Rousseau, de Paine à Jefferson ou, et oui de Laurier à Trudeau – l’échangeraient pour une association politique condamnée aux ruines avec des étudiants. Nous pouvons faire mieux. Nous le devons à ceux qui nous ont défriché le chemin.
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