La bêtise et le mensonge ont la vie dure. Ceux qui se sont donné pour tâche de les combattre auront toujours du pain sur la planche. Dans mon dernier Brasse-camarade, Les troubles continuent sur la rue Saint-Denis. Qui y mettra fin ?, je revenais sur les manifestations organisées chaque samedi sur la rue Saint-Denis dans le cadre de la campagne BDS (Boycott, désinvestissement Sanctions) par l’organisme appelé PAJU (Palestiniens et Juifs Unis). Il faut malheureusement que je revienne à la charge.
Stéphane Gendron, maire de Huntingdon et coanimateur (avec Caroline Proulx) à l'émission du matin «Face à Face», au canal V, tenait le 29 décembre 2011 des propos virulents contre l'État d’Israël, qu’il qualifia alors de «régime d'apartheid». Rendant hommage au député de Mercier Amir Khadir, qui avait appuyé ouvertement en décembre 2010 le boycottage de la boutique Le Marcheur sur la rue Saint-Denis — et ensuite continué de le faire, mais en catimini —, Gendron déclarait : «Les produits faits en Israël sur des terres [volées] aux Palestiniens qu'on maintient emmurés dans un régime d'apartheid où on leur coupe leurs vivres, c'est grave ! » Conclusion de Gendron : « Malheureusement Israël ne s’est pas encore effondré. Un pays comme ça ne mérite pas d'exister. »
Très critiqué pour ces propos — V télé reçut de nombreuses plaintes —, Gendron présenta ses excuses le 27 janvier 2012. Lisant en onde un communiqué, il affirma que les Juifs avaient bel et bien le droit de former un État et se dit désolé d’avoir offusqué certaines personnes, tout en précisant que dénoncer les politiques du gouvernement israélien face aux Palestiniens ne faisait pas de lui un antisémite. Manifestant l’espoir que les Palestiniens et les Israéliens puissent un jour vivre côte-à-côte, de façon pacifique, Gendron conclut en disant qu’il ne voulait plus entendre parler de cette affaire. Le même jour V télé publiait un communiqué dans lequel on pouvait lire : « V a réitéré aujourd’hui que le réseau se dissocie des propos regrettables de l’animateur Stéphane Gendron à l’endroit des Juifs et d’Israël. V tient à rassurer le public que de tels propos ne seront plus tolérés sur ses ondes. En outre, M. Gendron a exprimé ses regrets en ondes aujourd’hui. »
L’affaire semblait donc réglée. Gendron avait proféré des sottises, il s’en était excusé, il pouvait croire qu’on lui ficherait désormais la paix avec cette sale histoire ! C’était sans compter sur le zèle de Bruce Katz, le président de PAJU (Palestinens et Juifs Unis). Katz se porta donc au secours du maire de Huntingdon dans une lettre ouverte qui parut dans vigile.com et dans L’Aut’e journal .
Le texte de Katz, que je vous invite à lire, est stupéfiant de mauvaise foi et mêle à qui mieux-mieux demi-vérités, mensonges, interprétations biaisées voires délirantes. J’aurai l’occasion dans un autre contexte de reprendre point par point les arguments fallacieux utilisés par Katz. Je dois me contenter ici d’attirer votre attention sur un détail d’une grande importance : Gendron et Katz affirment tous les deux ne pas être antisémites. À cet égard cependant, Katz et ses amis de PAJU de même que leur ami Amir Khadir, ont précédé Gendron de plusieurs mois.
Dans une entrevue avec Benoît Dutrizac le 20 janvier 2010, Amir Khadir utilisa, pour blanchir ses amis de PAJU de tout soupçon d’antisémitisme, l’argument suivant : « La gang de malades dont vous parlez, disait Khadir, c’est des professeurs de cégep d’origine juive, c’est une jeune Juive des Laurentides qui a vécu toute sa vie... » «Ça change rien ! » répliqua Dutrizac. Et Khadir de poursuivre : « [...] Vous avez des jugements un peu faciles, un peu rapides qui sont tous taillés sur le modèle du B’nai Brith puis du Congrès juif canadien qui sont aveuglés par les millions, d’accord ? ! »
Le mois suivant, en février 2010, le « chef » des manifestants, William Sloan, qui est un proche collaborateur de Bruce Katz, suivit la piste tracée en janvier par Amir Khadir et déclara : « On ne peut pas nous traiter d’antisémites puisque nous sommes juifs pour la plupart... »
Non antisémites parce que Juifs... l'argument est fallacieux. Il existe dans l’histoire de nombreux cas de Juifs judéophobes ou antisémites. Karl Marx et Ferdinand Lassalle en sont d’illustres exemples, ainsi que la romancière française, Irène Némirovsky, que son hostilité envers les Juifs et la culture juive n’empêcha pas d’être gazée en 1942 à Auschwitz-Birkenau. Michel Epstein, son mari, qui allait être gazé quelques mois après elle, écrivit à Otto Abetz, ambassadeur du Reich en France pour expliquer à ce dernier que bien que Juive, sa femme n’avait jamais aimé les Juifs. Démarche qui ne les sauva ni l’un ni l’autre. De nos jours on ne parle plus de Juifs antisémites mais de Juifs antisionistes, comme Noam Chomsky ou Norman Finkelstein. Plusieurs vivent en Israël (Gideon Levy, Ilan Pappe, Michel Warschawski, Schlomo Sand, etc.). Ces individus sont tous d’extrême gauche, sauf certains groupes ultra-orthodoxes, que le plus virulent des antisionistes contemporains, Mahmoud Ahmadinejad, exhibe parfois devant les foules iraniennes comme des phénomènes de foire.
Je n’affirme pourtant pas que les PAJUstes sont antisémites. Stéphane Gendron non plus, d’ailleurs. Ils sont purement et simplement antisionistes, mais ont adopté par rapport à l’État juif la même attitude par rapport aux Juifs dans leur ensemble. Le rejet d’Israël a succédé au rejet des Juifs, devenu politiquement incorrect. Il n’en va évidemment pas de même dans les pays musulmans, ni dans les greffons islamistes implantés dans les pays occidentaux, où antisémitisme et antisionisme sont amalgamés. Constatons seulement que les PAJUstes, leur Ami Khadir — et le maire Gendron quand il se met à divaguer — tiennent à propos d’Israël le même discours, visent les mêmes objectifs et utilisent les mêmes moyens — moins les mortiers et les bombes humaines — que leurs alliés islamistes du Proche-Orient.
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