Réflexions sur les revenus

Par Germain Belzile le 1 mai 2008

Le temps des impôts approchant à grands pas au Canada, je vous propose un « thought experience » que je mène régulièrement avec mes étudiants, dans un cours d’économie du bien-être et de la taxation.

L’État-nounou nous oblige à lui verser à chaque année des sommes importantes sous toutes sortes de formes (impôts sur le revenu, taxes diverses, impôts sur la richesse foncière), dont une part importante ne sert pas à produire des biens « publics », mais est plutôt redistribué. Bien peu de gens remettent en question cette notion même de redistribution des revenus.

Mes discussions avec mes étudiants m’amènent à croire que le soutien à ces politiques (ou l’apathie généralisée) relève plus d’une forme de conditionnement ou d’habitude que d’un soutien théorique ou moral profond.

Voici comment j’approche le problème avec mes étudiants : en début de séance de cours, je propose à ma classe que l’on procède à une redistribution des points accumulés par chacun au cours du trimestre. Ainsi, ceux qui auront performé bien mieux que la médiane céderont des points à leurs collègues « moins fortunés ». La moyenne ne changera pas, mais les notes n’iront plus de E à A+. Les meilleurs ne pourront plus espérer qu’un B+ et les plus faibles obtiendront un C-.

Assez rapidement, « all hell breaks loose » ! La plus grande part des étudiants sont en pétard face à ce qu’ils voient comme une injustice. Parmi leurs objections, notons. :

« Je travaille fort. Ce sont mes notes. Pourquoi devrais-je en céder à ceux qui travaillent moins ? »       « On encourage ainsi le resquillage : certains travailleront moins fort et se contenteront d’un C-, aux dépens des autres. »

« La moyenne diminuera, car     tous feront face à des incitations moins fortes pour performer »

Et ils réalisent très vite que c’est ce qui se produit avec le système de taxes-redistribution. Les taxes ne sont pas neutres. Nous sommes collectivement plus pauvres lorsque l’État s’ingère dans nos vies en taxant l’effort de ceux qui travaillent.

En fait, le cas des taxes est bien plus grave que celui des notes. En plus de diminuer l’incitation à travailler et à entreprendre, les taux marginaux de taxation élevés réduisent l’investissement sous toutes ses formes (en capital physique, en innovation et en éducation). Y aurait-il beaucoup d’étudiants à HEC si tous occupaient un emploi semblable et gagnaient la même chose, quelque soit leur diplômation ? Mes étudiants, qui font face à un coût d’opportunité élevé en passant des années aux études au lieu d'aller directement sur le marché du travail, ne s’y trompent pas.

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