À la fin du 19ème siècle, alors qu’autour de la prohibition de l’alcool se dresse de véritables mouvements politiques partout en Amérique du Nord, le Québec s’inscrit à contre-courant en votant à deux occasions référendaires contre la prohibition. À cette époque, même l’Église s’opposait à la prohibition prêchant plutôt la modération. C’est d’ailleurs cette voie qui fut empruntée par le gouvernement du Québec. La Commission des Liqueurs du Québec fut donc créer pour superviser sa «le commerce des spiritueux et des vins et soumet au contrôle de cette même Commission le commerce de la bière». Au début, l’objectif était de lutter contre les méfaits de l’alcool grâce à la réglementation de la distribution et de la consommation. Néanmoins, avec le temps la commission s’est détourné de cette origine en faveur d’une mission commerciale en devenant la Régie des Alcools puis la Société des Alcools du Québec. Aujourd’hui, la Société des Alcools est devenue un paradoxe en tant que politique publique tout en nuisant aux consommateurs et à de multiples entrepreneurs. La solution est simple : privatiser!
Nous devons largement questionner les méthodes employées par la Société des Alcools pour remettre les dividendes que le gouvernement réclame au monopole comme le scandale de l’euro où la SAQ avait refusé d’adapter sa majoration des prix au taux de change ou même en chargeant le double du prix d’une bouteille américaine. Néanmoins, les défenseurs de la SAQ, notamment le syndicat représentant les travailleurs de la SAQ, clament que celle-ci fait en sorte que les gens consomment moins. Ce vœu pieux est toutefois en complète contradiction avec l’objectif de la SAQ de ramener le plus d’argent possible au gouvernement? La SAQ n’est rien de plus qu’une énorme structure inefficace, parce que c’est un monopole qui maximise ses rendements en offrant des produits de piètre qualité a des prix absurdes comme le notait récemment le Journal de Montréal. Cela pénalise les consommateurs.
On se doit de comparer la privatisation du monopole d’État sur l’alcool en Alberta avec le cas de la SAQ. Comme le notait l’étude de l’Institut Économique de Montréal, en Alberta, il y a 1087 magasins (population inférieure au Québec) et au Québec, il y a 801 succursales. Quant aux produits disponibles, leur quantité a augmenté drastiquement depuis la privatisation de 1993 : 11 575 en Alberta contre 7148 au Québec. Quant aux prix, ils sont presque 20% moins chers en Alberta et malgré cela, les dividendes la vente d’alcool par litre est de 24.74$/litre pour l’Alberta face à 23.43$ pour le Québec grâce à un système de taxation bien pensé. Il y a même plus d’emplois dans ce secteur qu’avant la privatisation. Les Albertains ont clairement bénéficié de la privatisation et de la libéralisation du commerce de l’alcool. Alors, on a toutes les raisons de croire que la privatisation bénéficierait aux consommateurs tout en rapportant des revenus similaires au gouvernement.
Il y a un plaidoyer à faire en faveur de la privatisation et donc d’une libre compétition dans le milieu de la production, distribution et vente d’alcool. Ce ne sont pas les producteurs Québécois qui manquent et il existe des entreprises qui seraient intéressées à entrer sur ce marché. Néanmoins, l’ingérence gouvernementale dans le commerce de l’alcool peut être identifiée dans de récents changements apportés à la réglementation québécoise en matière de commerce de vin dans les épiceries. Ces amendements réglementaires, entrés en vigueur en mai dernier, n’ont fait l’objet d’aucune couverture médiatique, même s’ils viennent interdire la commercialisation en épicerie de vin sous une marque privée d’un grossiste en alimentation. Quelle bonne façon de réduire la palette de produits disponibles aux consommateurs! Je peux ainsi difficillement concevoir qu’il n’existerait pas de concurrence dans le secteur de l’alcool surtout quand on est rendu à interdire aux grossiste de distribuer leurs propres marques de vins.
Si les défenseurs de la SAQ veulent maximiser les revenus que la SAQ remet à l’État et réduire la consommation des Québécois pour éviter les «sévices» de l’alcool, ils se retrouvent en plein paradoxe. S’ils choisissent l’argument des revenus, ils doivent démontrer qu’il est impossible dégager les mêmes revenus gouvernementaux sans la SAQ. S’ils prouvent cela (ce qui n’est pas le cas à mon avis), on devra accepter d’avoir moins de produits plus dispendieux. S’ils choisissent l’argument de la consommation, ils admettent de considérer que les Québécois ne savent pas boire nécessitant ainsi supervision S’ils choissisent les deux, l’incohérence entre maximiser les revenus du monopole et réduire la consommation est clair. Dans tous les cas, une forme de prohibition s’exerce et au final c’est le consommateur qui est le grand perdant.
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