L’année 2009 nous réserve-t-elle quelque surprise ? Au Canada, et au Québec en particulier, se produira-t-il quelque événement inattendu qui ferait dire aux générations futures que nous venons de vivre un moment-clé de notre évolution ?
Ce ne sera pas le cas cette année, car cet événement historique, rien ne l’annonce et personne ne le souhaite. Il ne se produira rien de comparable en 2009 à ces événements charnières que constituèrent jadis la première victoire électorale du Parti Québécois, le rapatriement de la constitution canadienne ou l’échec de l’Accord du Lac Meech. Aucun changement significatif ne se profile donc à l’horizon et 2009 ne sera sans doute que la suite paisible de l’année 2008.
Je crois que nous pouvons et devons nous en réjouir. Ceux qui préféreraient vivre dangereusement, plutôt qu’habiter un pays si tranquille que certains y périssent de neurasthénie, devront compter sur une nouvelle crise du verglas ou sur un nouveau déluge du Saguenay pour rompre avec la monotonie du quotidien. Mais ça leur en ferait, une belle jambe, que les inondations du printemps noient les sous-sols de l’Assemblée nationale ! Ces catastrophes éventuelles, qui ne changeraient rien au fait fondamental que, parmi les habitants de la Terre, nous comptons parmi les plus privilégiés, passeraient vite au rayon des profits et pertes. Et ce ne sont ni les campagnes électorales fédérales ou provinciales, ni les chicanes Ottawa-Québec, ni la baisse du dollar, ni la crise économique qui vont y changer quoi que ce soit. Après les chicanes, les compromis ; après la crise, la reprise ; et vogue la galère. Il est cependant loin le jour où un homme politique commencera un discours par la déclaration suivante : « Canadiens, Canadiennes ; Québécois, Québécoises, le bonheur est votre lot quotidien. »
Cela dit, l’auteur de ces lignes ne nie pas l’existence dans notre société de réels problèmes. Je pense à notre système d’éducation, et plus particulièrement à nos universités dont le sous-financement asphyxie le fonctionnement, aucun gouvernement n’osant imposer des hausses de frais de scolarité dont une indécrottable légende urbaine prétend qu’elles restreindraient l’accès aux études supérieures. Je pense également aux pénuries de main d’œuvre dans certains secteurs clés de l’économie.
Je pense aussi au débat stérile qui oppose les souverainistes aux fédéralistes. Comment ne pas citer à ce propos ces lignes du regretté Laurent-Michel Vacher : « [...] le Québec francophone est plongé depuis plus de vingt ans dans une rêverie à la fois malsaine et sotte, paradoxalement vécue comme un mirobolant triomphe d’affirmation collective. » (1) Ceux qu’on appelle les souverainistes ne sont pas les seuls responsables de cette stagnation mentale, les fédéralistes étant souvent les premiers à enfourcher le dada nationaliste quand quelque différend se dessine entre Québec et Ottawa. Ainsi, le ministre des Finances, Jim Flaherty, a déjà annoncé l’intention du fédéral de modifier les règles de la péréquation, ce qui pourrait réduire de un milliard les transferts au Québec. Si ces modifications ont lieu, justifiées ou non, elles auront des conséquences graves sur le budget que doit présenter à la mi-mars le gouvernement Charest. Parions que le premier ministre ne résistera pas à la tentation d’emprunter à la rhétorique nationaliste en dénonçant Ottawa en des termes que ne renierait pas Jacques Parizeau. Sauf qu’il n’ira pas jusqu’à dire que le fédéralisme canadien ne « fonctionnant pas », la seule solution, c’est la souveraineté.
« [...] Ceux qu’on a baptisés “fédéralistes”, écrit aussi Laurent-Michel Vacher (qui affirme d’ailleurs en être un), sont simplement les tenants du statu quo face à la question du maintien du Québec au sein du Canada (est-il besoin de souligner que nombre d’entre eux se fichent éperdument que le Canada en question soit “fédéral” ou pas) (2). » Tel est mon cas. Comment renouveler le discours fédéraliste ? En faisant silence sur la question. Le fédéralisme, on s’en fiche, c’est le Canada qui importe.
Je sens que peu d’oreilles québécoises seront sensibles à mon message. Trop de gens de chez nous ont adopté une étrange ligne de conduite : les yeux braqués sur le passé, avancer à reculons, entrer dans l’avenir en lui tournant le dos.
(1) Laurent-Michel Vacher, Une petite fin du monde, Éditions Liber, p. 163.
(2) Ibid., P. 160.
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